Voici un ensemble de propositions simples : l’Église catholique est une communion de diocèses ayant chacun un pasteur qui est un évêque, célébrant principalement dans une cathédrale ; ledit évêque étant entouré d’un presbyterium dont l’une des missions importantes est d’administrer des paroisses.
Lorsque saint Paul s’adresse aux Corinthiens, il propose un modèle d’organisation qui est celui de l’Église d’Antioche : (1 corinthiens 12, 28) “ Dieu les a placés dans l’Église, premièrement comme apôtres, deuxièmement comme prophètes, troisièmement comme docteurs ”. On voit donc qu’il n’est nullement question ni d’évêques, ni de prêtres ou de diacres.
Mais l’Église de Jérusalem s’est organisée différemment en gardant un modèle traditionnel des communautés juives (influence de l’apôtre Jacques). A la tête de la communauté l’on trouve un groupe de presbytes, c’est-à-dire des Anciens (la presbytie étant une maladie des anciens). Il est important de ne pas traduire ce terme par « prêtre », bien que ce terme en dérive, car ce serait faire un anachronisme en ayant à l’esprit l’assimilation « presbytes = sacerdos ». Les Anciens ne sont pas “ ceux qui donnent le sacré ” (sacerdos) mais ceux qui veillent ensemble sur la communauté, aussi bien au plan spirituel qu’au plan matériel. Ce même modèle, on va le retrouver dans les communautés judéo-chrétiennes de Cilicie, tout comme dans les communautés du sud de l’Asie Mineure.
Mais lorsque Paul s’adresse à l’Église de Philippes en Macédoine, il est question d’autres ministères encore. Paul tient tout particulièrement à saluer les “ épiskopoi kai diakonoi ”, c’est-à-dire les surveillants et les ministres – qui donneront bien sûr les évêques et les diacres – mais pour l’instant c’est simplement une autre manière de désigner ceux qui ont le souci de la communauté.
On voit donc comment les communautés se sont développées dans des cadres relativement différents et il a été nécessaire d’attendre le 4ème siècle pour qu’une convergence puisse se faire entre les différentes communautés et que l’on aboutisse au principe : « une communauté, un évêque ».
Une « communauté », mais il faudra encore attendre avant que l’on parle un peu partout d’une communauté qui est un « diocèse ». Le mot « diocèse » vient de l’administration de l’Empire romain à la fin du 3ème siècle. La circonscription de base dans cet empire est la province et le diocèse est un niveau plus élevé, c’est la réunion de plusieurs provinces.
Lorsque les chrétiens vont pouvoir se donner une visibilité, c’est-à-dire après l’édit dit « de Milan » de l’empereur Constantin (313) permettant la pluralité religieuse, ils vont globalement se calquer sur la géographie de l’Empire. Chaque province romaine avait une cité où résidait le représentant de l’empereur. Ce sont ces cités qui vont accueillir les responsables des Églises chrétiennes que l’on désignera comme des évêques.
Mais cette subdivision confiée à un évêque est d'abord appelée « parokia », c’est-à-dire « paroisse », et c'est seulement vers le 5ème siècle, ou même le 6ème siècle, que le mot diocèse fut repris de l'administration civile romaine.
On a alors établi un parallélisme : une province romaine = un diocèse. Et l’on a vu naître des questions sur les frontières des diocèses durant l’Antiquité tardive – ce qui est, pour le moins, une fausse question car c’est projeter l’image d’un « diocèse territoire » qui n’a pas de sens à cette époque. L’évêque, le presbyterium et la communauté sont dans la cité. Le christianisme a été longtemps un phénomène urbain. Hors de la cité ce sont les païens (pagus) qui ont donc la même étymologie que les paysans.
Cela signifie donc qu’il est vain, pendant plusieurs siècles, d’aller chercher des églises rurales. L’église est celle de l’évêque et de son presbyterium. On l’appelle « l’église de l’évêque » et, au fond de l’abside, il y a la cathedra – la cathèdre, qui est le siège réservé à l’évêque permettant à celui-ci d’être vu de l’assemblée et de voir l’assemblée. Elle est un symbole du pouvoir épiscopal. Au fil du temps, cette église de la cathèdre va devenir plus simplement la cathédrale.
Les paroisses rurales pour naître vont supposer la séparation entre l’évêque et une partie du presbyterium : lorsqu’un prêtre quittera la paroisse de l’évêque pour aller s’occuper d’une paroisse rurale, il prendra le nom de "curé" (du latin « curare », « soigner », « s’occuper de »). Ce phénomène connaît un développement à l’époque carolingienne et c’est généralement dans le dernier tiers du 12ème siècle que l’on voit apparaître des listes de paroisses (vers 1170).
On voit donc que faire de l’histoire c’est vraiment prendre conscience que rien n’est simple et que l’on ne peut comprendre le passé en projetant sur celui-ci une forme d’organisation qui est la nôtre aujourd’hui. Ceci est vrai de tout diocèse et l’est donc aussi du diocèse de Darantasia.