La loi sur le travail obligatoire (STO) fut promulguée le 16 février 1943. Elle appelait, pour un service de deux ans, les hommes nés en 1920-21-22. Elle ne disait pas expressément que le temps de service se passerait en Allemagne, mais, avec raison, tout le monde le comprenait ainsi. Ces jeunes avaient déjà été appelés pour certains à faire le stage des Chantiers de Jeunesse. En effet, l'armistice du 22 juin 1940 ayant supprimé le service militaire obligatoire, les chantiers de jeunesse sont créés à la place, le 30 juillet 1940. Les jeunes hommes de la zone libre et de l'Afrique du nord française en âge (20 ans) d'accomplir leurs obligations militaires (donc d’abord ceux nés en 1920), y sont incorporés pour un stage de six mois – ce temps sera porté à 8 mois l’année suivante. Ils vivent en camp près de la nature, à la manière des scouts, mais à la différence importante qu'ils ne sont pas volontaires et ils accomplissent des travaux d'intérêt général, notamment forestiers, dans une ambiance militaire. Ils sont encadrés par des officiers et des sous-officiers d'active et de réserve démobilisés, ainsi que par des aspirants formés pendant la guerre de 1939-1940.

Pierre Bergeri (à gauche) et deux camarades des Chantiers de Jeunesse.
© Photographie famille Bergeri - Reproduction interdite.
Le STO est donc très différents : il est obligatoire, mais pour accomplir un travail « civil » et en Allemagne. Dans un premier temps les autorités de Vichy ont procédé à un recencement qui est dénoncé par Londres comme un traquenard, invitant les jeunes concernés à ne pas se soumettre à cette mesure.
Le 18 mars 1943, Maurice Schumann pouvait annoncer à Radio Londres que le premier maquis était né, c’était un maquis savoyard.
En effet, en Savoie 3 849 jeunes avaient été recensés. Sur ce total, il y eut : 1 577 insoumis, 1 678 exemptés ou sursitaires, 325 réfractaires, 269 seulement (7%) partirent pour l’Allemagne.
C’est donc le mot ‘maquis’ qui a été choisi pour désigner les lieux où se réfugiaient les réfractaires et insoumis. C’est un mot corse qui désigne un terrain couvert d’arbustes et de broussailles. ‘Prendre le maquis’ signifiait ‘se cacher pour échapper aux forces de l’ordre’ ; c’est le mot qui sembla le mieux convenir pour désigner ces lieux – le plus souvent des chalets dans les alpages – où les jeunes se réfugièrent pour ne pas partir au S.T.O.
Mais les maquis étaient dangereux : même en montagne, une concentration de jeunes hommes devenait rapidement visible. Nous sommes à l’époque où la Gendarmerie avait pour mission de débusquer ces maquis. Une parade fut rapidement trouvée : il était possible de travailler pour l’Allemagne … en France, en étant embauchés dans des usines, des mines ou des scieries de la région dont l’activité avait été détournée au service de l’Occupant. Les chefs de la Résistance des secteurs III (Albertville) et III bis (Moûtiers) ont eu la sagesse d’éviter des concentrations trop importantes : beaucoup de jeunes du Beaufortain purent intégrer le chantier du barrage de la Girotte et, les tarins, les mines de La Plagne. N’oublions pas qu’il n’y eut pas que des maquisards locaux mais que la Savoie devait accueillir des « Malgré-nous » - principalement des jeunes alsaciens qui refusaient d’être intégrés dans l’armée du III° Reich.
Cette lutte contre le STO avec constitution de maquis fut l’une des premières tâches de ceux qui vont devenir les piliers du Secteur III bis et la chronologie montre bien que Maurice Schumann, si cela n’avait été trop dangereux, aurait pu préciser que parmi les premiers maquis il y eut ceux d’Aime et de Moûtiers.
Installé dans les montagnettes du Plantin aux Allues, dans un chalet appartenant aux frères Barral, le maquis moûtiérain a été organisé le 9 mars 1943 par Joseph et Pierre Bardassier, Louis Sibut, Gustave Machet, Pierre Maggi, Gabriel Dullin et Joseph Guillet.
Il était constitué de jeunes de la classe 40 à 42 : André Perrier de Saint-Marcel et, Bianco, Bermond, Charpin, Combaz, Delphin, Dien, Claude Duboin, Nantet, Nellio, Quilico, Ramici, Hector et René Rosso, Roger Vignet, Georges Visintainer, et Vallet de Moûtiers.
Inquiété par la gendarmerie, ce maquis fut ensuite transféré dans des chalets de Glaizette, au-dessus de Notre-Dame de Briançon. Il fonctionna jusqu’à fin mai 1943, les jeunes étant alors placés dans les mines, les scieries ou les usines ; ce qui permettait donc d’avoir un statut permettant de rester en France.
D’autres jeunes rallièrent le maquis de la Plagne qui avait fait suite à celui de Planvillard (créé le 03 mars 1943), pour le canton d’Aime, et dont Joseph Bardassier prit la direction le 15 août 1943.

Les premiers maquisards de Planvillard font mouvement pour rejoindre La Plagne

Été 1943 : Joseph Bardassier (point rouge) à La Plagne pour la gestion du maquis et des repérages
© Photographie famille Bardassier - Reproduction interdite.